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Café viennois
1 février 2013

Klimt et Freud

 

Gustav Klimt est né à Vienne le 14 juillet 1862. Il est donc le contemporain de Sigmund Freud (né en 1860), du compositeur Gustav Mahler (né en 1860) et du dramaturge Arthur Schnitzler (né en 1862), autres piliers de la modernité viennoise. Ses origines sont assez modestes : son père est artisan-orfèvre et sa mère chanteuse lyrique. Très jeune, il fait rapidement preuve d'une grande habileté dans le domaine artistique et s'inscrit non pas à l'académie des Beaux Arts mais à l'école des Arts appliqués de Vienne, dont il suit l'enseignement de 1876 à 1883. Avec son frère Ernst et son condisciple Frantz Matsch, il fonde son propre atelier de décoration. Bientôt, les commandes affluent : de province d'abord (fresques pour le théâtre de Karlsbad et de Fiume), de Vienne ensuite (villa Hermès, l'escalier d'honneur du Burgtheater et du Kunsthistorisches Museum). Klimt prend pour modèle Hans Makart (1840-1884), peintre académique et officiel, considéré en son temps en Autriche comme le Rubens de l'éclectisme historiciste et dont il apparaît comme le successeur naturel. Il aurait pu poursuivre dans cette voie, engrangeant les honneurs. Mais après la mort de son frère, en 1892, il dissout l'atelier, cesse de peindre pendant plus de deux ans et se remet en question. Rien ne le prédestinait à devenir le chef de file de la modernité en Autriche. Klimt n'était ni un théoricien ni un tourmenté, à l'image de son futur disciple Egon Schiele. Ses contemporains le décrivent comme un hédoniste, sujet parfois à des phases dépressives, comme un être instinctif doué d'une formidable énergie, mais non comme un intellectuel. Toutefois, cet artiste ouvert et intuitif était capable de saisir et d'apprécier les réflexions et les recherches d'autrui pour en faire son propre miel. Les cafés où se réunissaient régulièrement poètes, écrivains, musiciens, peintres et architectes (comme le Café Griensteidl ou le Café Central) furent les véritables laboratoires de la modernité viennoise.

 

 

 Tout comme Freud, sa réaction à la société rigoureuse et suffocante de l'époque va bouleverser les codes. Il entame sa carrière dans la lignée de la peinture « pompier » alors à la mode, comme décorateur de bâtiments publics prestigieux. Peu à peu Klimt s'éloigne de l'académisme et affirme un style personnel : la décoration du grand escalier du Kunsthistorisches Museum de Vienne (1890) est déjà peuplée des femmes fatales qui hanteront son oeuvre et qu'il aimera peindre (Portrait d'Adèle Bloch-Bauer, 1907) ou dessiner, parfois nues et dans les attitudes les plus suggestives.La peinture de Klimt marque le symbolisme de la Sécession viennoise, fondée en 1897 : le rejet des conventions, le recours à des allégories complexes, le goût pour les thèmes mêlant sexe et mort, la précision du dessin et la profusion décorative caractérisent la fascinante Frise Beethoven (1902).

Comme un jumeau silencieux de Kandinsky, convaincu comme lui de la mission spirituelle de l’art, Klimt n’imaginait d’autre salut qu’artistique à la crise économique, politique, morale et intellectuelle que traversait la Vienne fin de siècle. Malgré la réception difficile de son œuvre par ses contemporains, il apparaît clairement aujourd’hui qu’il a non seulement contribué à mettre l’art à la portée du plus grand nombre, mais qu’il a également accompli quelque chose de cette mission d’élévation spirituelle dont il le pensait investi. En 1900, le refus par l’académie des toiles préparatoires aux allégories qu’elle lui avait commandées marque pourtant un tournant dans sa carrière. Sa Philosophie lui vaut le titre de peintre « prétentieux et métaphysicien2 », ses pairs fustigeant la « laideur » d’un tableau qui ne respecte pas les codes imposés par l’exercice, et qui le fait au nom d’une modernité dans laquelle ils voient la marque incontestable de la décadence. Klimt se retire alors dans la création, cheminant dans le développement de cette métaphysique qu’on lui reproche comme une tare et que lassé de défendre dans l’arène, il s’efforce de peindre à l’abri des regards. Il engage des évolutions majeures dans son œuvre : le recours de plus en plus poussé à l’ornement associé à un naturalisme stylisé, qui annoncent la période dorée ; la préférence accordée aux surfaces planes, à deux dimensions plutôt qu’au relief classique ; et bientôt l’abstraction s’imposent à lui comme des étapes nécessaires dans le questionnement de la « vérité nue » qu’il cherche à capturer. Dans le même temps, ses thématiques s’articulent autour de la saisie de la résonnance profonde et singulière qu’il perçoit entre la question de la vérité et l’énigme du féminin, qui le fascine jusqu’à l’obsession. Est-ce parce qu’il a très tôt posé cette question que Freud assignait comme tâche au xxe siècle, « que veut la femme ? », que Klimt semble à ce point notre contemporain ?

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Commentaires
Café viennois
  • je te conterai l'histoire celle qui n'est pas écrite qui vient rarement pour l'exhumation des rêves j'ai pour preuve le silence transpercé de balles c'est pourquoi je parle à voix basse je conterai l'histoire mais ne la répète pas
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